une journée pas comme les autres...

voilà, les vacanciers sont rentrés…ça a été très dur psychologiquement pour moi…je m’habitude tellement vite à la solitude…même si la solitude me pèse parfois, je crois que viscéralement je la préfère à la compagnie de l’autre…mais sans doute est-ce lié au fait que je conçoive cet autre comme un danger compte tenu de ces fameux toc et rituels qui me pourrissent la vie eux depuis plus de 20ans mais encore bien plus depuis l’anorexie…ensemble d’actions à accomplir,objets à mettre à leur place,chiffres,mots à éviter, compter, penser à certaines choses, personnes : façons de faire, façons de dire, façons de me poser,façons de bouger, façons d’accomplir chaque geste et action du quotidien,façons de vivre en somme…toute ma journée obéît rigoureusement à ce schéma ritualisé, toujours le même, toujours le même…malgré mes multiples tentatives de ne pas faire, de faire autrement,le remède étant pire que le mal au final et renforçant alors les rituels précédents…le pathétique est bien là : dans mon monde où chaque objet a sa place, l’humain,l’autre, n’en a pas…l’autre est une menace permanente au bon déroulement de ma journée…que se passerait-il s’il venait à déplacer tel ou tel objet à poser telle chose ici ou là, à me parler à tel moment, à dire telle chose,etc…je ne le sais même plus tant et si bien je me suis enfermée dans ce monde autistique…voilà pourquoi la présence de l’autre m’insupporte et m’est si difficile :l’autre je ne le maîtrise pas comme un objet…et puis, au-delà de tout ça mes objets eux ne me regardent pas, ne me parlent pas, ne me menacent pas,…ainsi va ma vie, chaque jour étant identique au précédent lui-même identique à celui qui le précédait…une vie ou l’imprévu n’a vraiment pas de place car susceptible de rompre l’ordre bien établi des choses…et j’ai de ce fait beaucoup de mal à entreprendre des actions nouvelles car susceptibles à leur tour de devenir objet de rituel et toc…voilà donc un début d’explication à cette angoisse liée à la présence d’autres dans mon quotidien…et si en ce moment,je ne suis pas-plus chez moi mais chez ma mère dans la maison de mon enfance, je m’étais habituée seule, j’avais mis en place mes petits repéres… pourtant rien que d’avoir changé de lieu de vie consiste en une avancée pour moi, il y a quelques temps j’en aurais été incapable, tant l’idée de l’inconnu, de la nouveauté me terrorisait…mais leur retour me met face à une réalité dont je prends difficilement conscience et dont la solitude me préserve puisque la question ne se pose pas : il y a beaucoup à travailler encore au niveau des tocs et des rituels…seule, je ne me rends même plus compte d’à quel point ils sont présents et handicapants car j’évite ainsi d’être confrontée à l’imprévu…tout est bien rodé, rien ne semble m’échapper,je maîtrise tout…alors qu’en réalité, tout m’échappe, je ne maîtrise absolument rien mais je suis maîtrisée par ces rituels…mais c’est le prix de ma sécurité : ainsi il n’arrivera pas de malheur…il ne m’arrivera rien de mal…mais rien de bien non plus…mais c’est le prix de ma sérénité…pas si sereine que ça…la présence de l’autre, l’ingérable, le prouve…maispeut être qu'un jour, je me laisserai alle à la vie, je me laisserai vivre...